Point reforme retraite après rapport Delevoye
Les grandes lignes de du projet de réformes proposé par le HCRR :
- Régime universel public par répartition : les 42 systèmes de retraites (public, privé) sont fusionnés, incluant les systèmes complémentaires (AGIRC/ARCO) -> une pension unique
- Régime à points
- Jusqu’à 3 PASS (121 572€)
- Chaque euro cotisé donne les mêmes droits.
- Age légale à 62 ans mais système de décote/surcote évolutif avec l’espérance de vie.
Maintenir le poids des retraites dans les dépenses publiques
Les dépenses de retraite actuelle représentent en 2018 13,8% du PIB. Du fait des réformes précédentes et de la désindexation du montant des pensions de l’évolution des salaires moyens, ce taux atteindra 13,4% en 2050 malgré une augmentation de 26,5% du ratio des retraités sur actifs. Cela induit une baisse de 21% du ratio pension/salaire. La réforme proposée reste sur cet objectif de baisse des montants des retraites en accompagnant une promotion des retraites individuelles supplémentaires (souvent réservées aux salariés des grandes entreprises ou à hauts salaires).
Reculer l’âge de départ à la retraite
Dans le système actuel, l’âge ouvrant le droit à la retraite est de 62 ans. Pour obtenir le taux plein, la durée de cotisation requise est aujourd’hui de 41,5 années, elle passera à 42 ans en 2023, puis à 43 ans en 2035. Apres 62 ans, l’âge de départ en retraite dépend de l’âge de début de cotisation. Le taux plein est toutefois acquis à 67 ans.
Avec le nouveau système l’âge ouvrant le droit à la retraite resterait à 62 ans, mais un âge du taux plein de 64 ans serait introduit, avec 5% de pénalité par année manquante. Par rapport à la situation actuelle, les perdants seront les salariés ayant commencé à travailler entre 20 et 22 ans, les gagnants les cadres ayant commencé après 23 ans. Il est déjà prévu que l’âge du taux plein augmentera progressivement en fonction de l’évolution de l’espérance de vie ; il serait à 65 ans à partir de la génération 1975, à 66 ans, à partir de la génération 1987.
Le système sera foncièrement injuste, puisque surcote et décote ne tiendront pas compte des différences d’espérance de vie et de capacités à rester en emploi selon la carrière et la profession. A 62 ans, un ouvrier subira une décote de 10% ; à 66 ans, un cadre bénéficiera d’une surcote de 10%, alors qu’en réalité ils ont, à ces âges respectifs, la même espérance de vie et de capacité à rester en emploi.
Quel niveau de retraite ?
Le taux de cotisation des salariés sera de 28,12%, dont 25,31 points plafonnés à 120 000 euros par an (3 PASS) donneront des droits tandis que 2,81 points (assis sur la totalité du salaire) ne donneront pas de droits mais financeront les prestations de solidarité.
Le nouveau système sera un système à points. Au départ, 100 euros de cotisations donneront droit à 10 points. La valeur du point, son prix d’achat, serait indexée sur la croissance du salaire moyen. A 64 ans, le taux de rendement serait de 5,5%, donc une valeur de service du point de 0,55 euros. A ajuster en cas de décote/surcote dû à l’âge de départ en retraite (-10% à 62 ans, +10% à 66ans)
Le système à points préconisé ne fournit aucune garantie aux salariés sur le niveau de leur retraite. Il ne comporte pas de cible, d’objectif ou de garantie en termes de taux de remplacement (pension/salaire).
Contrairement à ce qui avait été annoncé, les retraites déjà liquidées ne seront indexées que sur les prix. Le niveau de vie relatif des retraités continuerait donc à se dégrader tout au long de leur retraite. L’équilibre financier du système continuera à dépendre du taux de croissance des salaires.
Le niveau des retraites sera une variable d’ajustement.
Pour les fonctionnaires, le niveau des primes aura un impact important. Par exemple les enseignants touchant peu de primes pourraient perdre 25% de leur niveau de retraite.
Les avantages familiaux
La majoration de durée d’assurance pour les femmes (actuellement de deux années par enfant élevé dans le secteur privé) serait supprimée. La majoration de pension pour enfant élevé passe à 5% par enfant, dès le premier enfant, au lieu de 10% pour 3 enfants et plus. Mais la majoration sera donnée à l’un des deux parents au lieu de bénéficier aux deux. Avec un choix aux 4 ans de l’enfant, on comprend vite les difficultés à venir en cas de séparation ou d’évolution de salaires.
La pension de réversion garantirait au conjoint (uniquement marié) survivant 70% des ressources antérieures du couple, de manière à maintenir son niveau de vie mais seulement après 62 ans !
La prise en compte de la pénibilité
Les dispositifs de carrière longue seraient heureusement maintenus. Ils permettront un départ à la retraite à 60 ans pour ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans, avec une valeur de service du point correspondant à un départ à 64 ans.
Le projet est peu loquace sur la prise en comptes des métiers pénibles, de ceux qui réduisent l’espérance de vie ou l’espérance de vie en bonne santé, de ceux enfin qu’il est difficile (et parfois impossible) de conserver après un certain âge. Cette prise en compte doit être la même dans le secteur privé et dans le secteur public.
Certains fonctionnaires pourront partir plus tôt (policiers, pompiers, surveillants pénitentiaires, contrôleurs aériens, militaires).
Pourquoi cette réforme ?
L’objectif réel de la réforme des retraites, qu’Emmanuel Macron et son gouvernement veulent imposer, est de garantir la stabilité (voire la baisse) de la part des retraites publiques dans le PIB, de passer du système actuel fournissant certaines garanties aux salariés en termes de taux de remplacement et d’âge de départ à la retraite à un système flexible permettant d’utiliser les retraites comme variable d’ajustement des finances publiques. Comme pour l’allocation chômage, le système est étatisé, le rôle des syndicats est réduit. La mise en avant d’une simplification, d’une forme d’équité, de la contributivité globale ne doit pas cacher l’objectif financier.
Le système d’assurance sociale doit être rédistributif, assurer des taux de remplacement plus élevés aux revenus les plus faibles, tenir compte de la pénibilité de la carrière et des possibilités de rester en emploi.
Il doit être rétributif, récompenser, dans une certaine mesure, l’évolution de carrière. Il est légitime que deux ingénieurs qui prennent leur retraite au même âge et au même salaire aient le même niveau de pension, même si l’un a commencé comme technicien. Il n’est pas forcément légitime que le niveau de la retraite dépende de la situation entre 18 et 25 ans.
Le système des retraites doit rester un système à prestations définies, c’est-à-dire que les droits des salariés et des retraites doivent être garantis et que l’équilibre doit être assuré par la hausse des ressources. Le système doit garantir un niveau de retraite satisfaisant, assurant la parité de niveau de vie avec les actifs, à l’issue d’une carrière normale, à un âge socialement garanti, de sorte que les salariés n’aient pas de difficulté à rester en emploi jusqu’à cet âge.
La retraite est un des piliers de notre pacte social. L’affaiblir c’est prendre le risque d’une perte solidarité et à terme permettre à l’individualisme de mettre en péril notre société.
Rapport Delevoye :
https://reforme-retraite.gouv.fr/IMG/pdf/retraite_01-09_leger.pdf
Analyse des économistes attérés :
http://www.atterres.org/article/rapport-delevoye-organiser-et-garantir-la-baisse-des-retraites
http://www.atterres.org/article/rapport-du-cor-un-d%C3%A9ficit-construit-de-toutes-pi%C3%A8ces
